Le
Petit Prince
(Le
chemin à l'envers)
Le
petit Prince s'est envolé seul, le vingt cinq décembre dernier de
Cap Juby (Afrique de l'Ouest) à bord d'un astronef totalement
révolutionnaire susceptible de se déplacer à des vitesses
supraluminiques. Il a emmené avec lui la collection complète des
livres de son créateur, Monsieur de Saint Exupéry et un dé à
coudre de sable du désert. Sa première destination, la lune a été
atteinte en un peu plus de deux secondes. Il a, à l'occasion, frôlé
la Station Spatiale Internationale et salué au passage notre ami
Thomas Pesquet notre astronaute émérite qui achève son premier
mois à bord, sur un total de six.
Ils
se connaissent bien tous les deux et l'un comme l'autre ont toujours
la même soif d'aventure.
Sur
la lune il est accueilli par un vieux camarade, un dénommé Jean
Mermoz surnommé l'Archange avec lequel s'est tissée de longue date,
une amitié indestructible. Ce Monsieur, un précurseur parmi les
aventuriers, a en son temps fait avancer l'aviation civile en France
à pas de géant. Il est présentement chef d'escale au cratère
Amstrong mais se réserve de temps à autres le droit de faire des
explorations locales sur Uranus, Saturne ou Pluton ou plus lointaines
dans les constellation d'Andromède ou de Casiopée. Accueillir les
astronefs terriens est toujours pour lui source de plaisir mais
côtoyer les peuples Amazones ou Atlantes constitue une occasion
unique de se ressourcer qu'il ne raterait pour rien au monde.
Avant
son départ le Petit prince l'avait contacté par deux impulsions
électromagnétiques, un code secret entre eux, afin d'être sur de
ne pas le rater. Pour l'heure ils parlent du bon vieux temps, de
leurs aventures au Sahara ou dans les Andes et surtout, surtout, de
leur ami commun Saint Ex., le Grand St Ex. cet homme admirable qui
était la bonté même et qui avait tous les talents. Depuis sa
disparition les deux amis sont très tristes. Leur plus grand souhait
serait de pouvoir le retrouver mais il est parti sans laisser
d'adresse et tous deux se demandent bien au sein de quelle galaxie il
se cache.
Une
recherche ciblée sur GoogleUnivers leur permet une première
approche : Le site WikiSpace précise qu'il a été hébergé
quelques temps par le peuple Daniken dans la galaxie de la Licorne.
Nos
deux amis adressent donc illico un signal codé au roi Amilcar Ier
pour plus d'informations et celui-ci comme à son habitude leur
répond sur le champ, par courrier intersidéral et leur indique la
dernière position connue de St Ex. qui, il s'en rappelle comme si
c'était hier, lui avait fait grosse impression. A-t-on idée de
voyager de nos jours à bord d'un aéronef antédiluvien, bimoteur à
hélice et bipoutre de surcroît affichant un poussif cinq cent
kilomètres heure et pas même capable d'échapper seul, à
l'attraction terrestre ? Mais bon on ne se refait pas et nous savons
tous que le Grand Homme a toujours été un peu excentrique ! Il
leur précise qu'à son départ, St Ex. lui avait confié vouloir
prendre une retraite bien méritée, sur la lointaine astéroïde B
329 en dehors des routes commerciales et des circuits touristiques
dans la constellation de la Chevelure de Bérénice, afin d'y
retrouver son ami « l'Allumeur de Réverbères ».
Le
Petit Prince et l'Archange sont bouleversés par la nouvelle et ils
sont tellement pressés d'aller le retrouver qu'ils en oublient de
remercier leur distingué correspondant. Il embarquent sans attendre
dans l'astronef du Petit Prince et suivent au Galactic Positioning
System plus communément appelé GPS la route la plus directe vers
l'astéroïde B329.
La
voix métallique de la commentatrice à fort accent étranger est un
peu crispante mais la fiabilité du système n'est plus à démontrer.
- « Profiter de l'attraction
Saturnienne, s'en servir comme d'un boomerang et faire route directe
sur Jupiter. »
La
route est longue et semée d'embûches que notre commentatrice leur
fait éviter avec élégance et professionnalisme.
A
l'approche de la galaxie de la Chevelure de Bérénice nouvelle
intervention :
- « Astéroïde B329 dans
quinze secondes. Décélération à mon top … cinq, quatre, trois,
deux, un, top. Correspondant prévenu vous attend à destination.
Espérons vous avoir procuré le meilleur guidage possible, vous
souhaitons bonne fin de vol, à très bientôt sur nos autoroutes
galactiques, votre dévouée Jenah »
D'imperceptibles
vibrations marquent la transition entre le vol à la vitesse
supraluminique et la vitesse hypersonique d'approche puis l'inversion
brutale du flux plasmatique génère une lueur bleutée très
reposante annonçant la fin imminente du vol. Le poser à l'intérieur
des installations souterraines n'est qu'une formalité pour le robot
pilote répondant au doux prénom de George. Nos deux amis n'ont que
le temps de voir se refermer au dessus de leur tête le panneau de
protection du puits dans lequel ils sont descendus que déjà
l'écoutille s'ouvre leur permettant d'apercevoir leur bon vieux St
Ex. les attendant au pied de leur astronef.
La
joie des trois amis est indescriptible. Il ont tant de choses à se
dire que cela leur prend plus d'une lune pour en venir à bout. Après
avoir passé en revue le fil de leur vie et de leurs aventures
respectives, ils décident pour fêter leur retrouvailles de
rejoindre l'astéroïde B327, l'astéroïde du Buveur.
Le
choix n'était finalement pas très judicieux, leur hôte est
toujours aussi taciturne. Difficile de trouver mieux pour casser
l'ambiance!
Très
vite ils quittent ce lieu lugubre et font route directe sur
l'astéroïde B330, celle du Géographe.
Le
Petit Prince est tout ému de retrouver son vieil ami, celui qui par
le passé l'avait envoyé sur la planète Terre et tout en
l'embrassant il essuie discrètement les larmes qui perlent sur ses
joues.
Après
ce moment d'émotion intense, St Ex. pour détendre l'atmosphère,
propose à l'Archange et au Petit Prince d'effectuer un pèlerinage
sur la planète Terre précisément, ce qui déclenche aussitôt
l'enthousiasme de ses deux amis.
D'un
commun accord ils décident de se rendre tout d'abord en France, à
Montaudran, dans l'agglomération Toulousaine, berceau
de leurs exploits. Ils ont quelques difficultés à reconnaître
l'endroit mais sont guidés de main de maître par l'âme puissante
de Didier Daurat toujours présente en ces lieux et sans qui
l'aventure de l'Aéropostale n'aurait jamais pu avoir lieu. En centre
ville, petite déception à l'hôtel « Le Grand Balcon »
où les traces de leur passage ont pratiquement disparu. Par contre,
bonne nouvelle, les « Ailes Anciennes » ont reconstruit
un Breguet 14 à l'identique qui est aimablement mis à leur
disposition. Ils laissent donc le grand public s'extasier devant leur
astronef et s'envolent à bord de l'avion mythique sur les routes de
leurs premières amours : Espagne, Maroc, Mauritanie,
destination Cap Juby. Tout au long du trajet c'est la fête à bord
et le Petit Prince ne peut s'empêcher de jouer aux acrobates sur les
ailes de l'aéroplane, le déséquilibrant parfois au point d'obliger
l'Archange qui est aux commandes, à réaliser de véritables tours
de force pour maintenir le frêle appareil en ligne de vol.
Retrouver
les dunes blondes ou rouges du désert est un enchantement et revoir
à leur destination une partie des installations où ils ont écrit
quelques unes de leurs plus belles pages de gloire est une sensation
indéfinissable qui les émeut au plus haut point. D'autres
vols suivront qui leur permettront de croiser d'interminables
caravanes tout à fait identiques à celles qu'ils avaient connues naguère et de survoler des oasis verdoyants où l'eau, précieuse en
ces contrées arides, coule en murmurant dans les « séguias ».
Ces
excursions permettent également au Petit Prince de retrouver son ami
le renard avec qui il a de longues conversations philosophiques.
Un
soir alors qu'un soleil de feu plonge doucement dans l'océan, le
Petit Prince fait une étrange demande à son créateur :
« Dessine moi un mouton » lui dit-il, et St Ex. avec sa
bonhomie coutumière de s'exécuter sur le champ, embellissant par un
dessin naïf leur carnet de route !
Du
Cap Juby ils font route maintenant sur Dakar où le Musée de
l'hydravion de Biscarosse a mis en place à leur intention un
Latécoère Laté 28 baptisé « Comte de la Vaulx »
parfaite réplique de l'aéronef utilisé par l'Archange avec ses
coéquipiers Dabry et Gimié, pour réaliser la première traversée
de l'Atlantique Sud.
Inutile
de décrire leur émotion au décollage pour Natal mais aussi durant
l'épique traversée du « pot au Noir » toujours
aussi délicate avec des aéronefs de cette nature !
A
destination, les Brésiliens n'ont rien oublié de leurs exploits
passés et leur manifestent bruyamment leur reconnaissance par des
sambas endiablées ainsi d'ailleurs qu'aux différentes escales qui
les conduisent de Rio de Janeiro à Buenos Aires via Montevideo.
Cette
ferveur et cette liesse populaire troublent le Petit Prince au plus
haut point et ses deux compagnons, ses héros, gravissent un échelon
de plus au fond de son cœur.
A
Buenos Aires un club de passionnés a reconstruit un Potez 25 et le
met à leur disposition pour poursuivre leur route au travers la
Cordillère des Andes, vers Mendoza et Santiago du Chili.
L'équipage
au grand complet s'est chaudement équipé pour affronter les
morsures du froid glacial qui règne à ces altitudes dans ces
contrées inhospitalières.
St
Ex. ne peut s'empêcher de penser à son ami Guillaumet et à sa
folle équipée à pieds et dans la neige, cinq jours et trois nuits
durant, après le crash de son avion à plus de trois mille mètres
d'altitude.
Enfin
c'est l'arrivée à Santigo du Chili où aucun chef d'état
auparavant n'avait été accueilli avec tant de faste ! Les
festivités s'échelonnent sur une semaine et le Petit Prince plein
d'entrain les trois premiers jours a bien du mal à suivre le rythme
par la suite.
Jamais
il n'aurait pu imaginer un seul instant combien ses compagnons,
défricheurs de lignes aériennes, pouvaient être vénérés dans
ces pays de l'hémisphère Sud où des rues, des places, des stades,
des salles de fêtes, portent leurs noms, où des monuments et des
stèles érigés en leur honneur rappellent leur épopée légendaire.
De
retour à Montaudran, des souvenirs plein la tête, le petit Prince,
l'Archange et St.Ex. embarquent à bord de leur astronef sous les
vivats de centaines de milliers de personnes.
Il
s'éloignent lentement de la Terre afin de jouir une dernière fois
du grand spectacle que leur offre la petite Planète bleue, unique et si
attachante.
Un
arrimage millimétré à la Station Spatiale internationale leur
permet de rendre visite à Thomas Pesquet, de le féliciter, de
l'encourager dans son entreprise et de lui souhaiter le meilleur
séjour possible à bord durant les prochains mois.
Puis
à regrets ils quittent la Station Spatiale pour regagner la Lune et
déposer l'Archange au cratère Amstrong où la séparation est
déchirante. Mais il faut poursuivre et ramener St Ex. sur
l'astéroïde B329.
Le
Petit Prince ne peut pas se résoudre à rentrer chez lui, il pleure
comme jamais il n'a pleuré auparavant, ce qui brise le cœur de son
créateur.
Enfin
devant tant de désarroi St. Ex. lui propose de partager avec lui son
humble demeure. Ce n'est pas très grand, c'est un peu spartiate mais
néanmoins chaleureux. Les larmes de détresse du Petit Prince se
changent peu à peu en larmes de joie. Il saute au cou de son héros
et le remercie de mille baisers. A l'évidence ces deux là sont
devenus inséparables pour l'Éternité !
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