samedi 17 décembre 2016



Conte de Noël,


Il était une fois un vieux couple de SDF qui vivait sous un pont de Garonne. Leur abri rudimentaire était composé de vieux cartons et d'un bric à brac hétéroclite, poussette caddie de super marché détourné de ses fonctions, vêtements décatis, chaussures trouées etc...

Dans la journée ils faisaient la manche ensemble ou séparément et le soir, leur souper se résumait souvent à un morceau de pain et à un bout de fromage, le tout abondement arrosé de vin rouge. A vingt heures ils avaient la langue pâteuse et avaient déjà beaucoup de mal à s'exprimer mais plus tard dans la nuit, ils étaient tous deux « ronds comme des queues de pelle». S'ensuivaient des rires gras et des réflexions grivoises ou alors des scènes de ménage, parfois violentes. Ils s'en prenaient aussi aux passants et les couvraient sans raisons de jurons et d'invectives de toutes sortes.

En cette période de l'Avent ils s'extasiaient sur les habits de lumières dont la ville s'était parée ou sur les vitrines de certains magasins élégamment décorées. Ces temps-ci les passants étaient plus enclins que d'habitude à laisser tomber une pièce de monnaie dans leur sébile, un billet même, parfois.
Tous deux aimaient bien cette période et pas uniquement à cause du regain de générosité des passants. Philomène s'attendrissait sur la belle poupée aux longs cils, en vitrine qui allait incessamment devenir l'héroïne d'une mignonne petite fille. Quant à François il admirait avec envie les trains électriques qui tournaient inlassablement sur leurs rails et dont l'un d'entre eux allait bientôt faire la joie d'un gentil petit garçon. Tout cela les ramenait à la réalité et leur faisait penser aux enfants qu'ils auraient pu avoir eux aussi si la vie s'était montrée plus clémente envers eux.

- «Regarde François comme elle est belle, j'envie la petite fille qui la recevra en cadeau pour Noël !
- Et moi si tu savais comme j'aurais aimé avoir un train électrique, j'en ai rêvé toute ma vie et j'en rêve encore. Crois-tu qu'il soit raisonnable à mon âge et dans mon état de rêver encore à un train électrique ?
- Mais oui mon François, il n'y a pas d'âge pour les rêves !
Moi aussi tu sais, j'imagine parfois que je vis une autre vie. Je suis une marquise et nous vivons toi et moi, mon prince, dans un joli château perché sur une colline. Depuis la tour médiévale nous pouvons de loin voir arriver nos invités en calèches et en landaus. Nous donnons de grands bals, nous invitons des troupes de danseurs, de musiciens et de saltimbanques et le château est ouvert pour un soir à tous les habitants du village que l'on accueille avec des guirlandes de fleurs.
- Oui ma princesse et nous faisons danser les plus humbles des manants jusqu'au petit matin. Il y a des victuailles et des boissons à volonté et je veille à ce que les verres ne restent jamais vides.
- Il y a des cadeaux pour tout le monde et cette nuit là, aucun des convives ne peux l'effacer de sa mémoire».

Au même moment dans l'un des plus grands magasins de la ville, le directeur de l'établissement très angoissé réunissait ses commerciaux afin de régler un épineux problème :
Les pères Noël n'étaient pas tous au rendez-vous, deux d'entre eux avaient fait l'école buissonnière. Il fallait les remplacer de toute urgence afin de ne pas décevoir les chères petites têtes blondes qui aimaient tant être pris en photo en leur compagnie !
Cette réunion de la dernière chance prenait un tour tragique car malgré toutes les prospections réalisées ces derniers jours, plus aucun père Noël n'était disponible, ni à Pôle Emploi ni sur les sites dédiés !
La voix de basse du directeur, chose inhabituelle, montait dans les aigus tant était grande son irritation :

- «Mais enfin mes amis il faut faire quelque chose, nous ne pouvons pas priver les enfants de Père Noël à deux jours de la Nativité ! Je suis impatient d'entendre vos suggestions» !
Les commerciaux penauds, fixaient leurs chaussures avec grande attention.
- «Alors, c'est donc cela que vous apprenez à l'école de commerce ? Creusez vous les méninges que diable et trouvez moi une solution».
Au bout de cinq longues minutes qui parurent des siècles, Mademoiselle Brigitte demanda la parole.
Sa voix à peine perceptible trahissait sa fébrilité :
- «Voila Monsieur, j'ai bien pensé à une solution de remplacement mai je ne suis pas sure que cela vous plaise :
Il y a régulièrement depuis plusieurs jours un couple de SDF qui s'extasie devant nos superbes vitrines, ne pourrions nous pas leur demander de bien vouloir jouer au Père et à la Mère Noël pendant deux jours» ?
Les profondes rides du front plissé du directeur s'estompèrent progressivement et son rictus fit place à un sourire qui alla en s'élargissant :
- «Mais voilà une idée de génie ma petite Brigitte, vous ne pouviez pas le dire plus tôt ? Savez vous où nous pouvons trouver nos sauveurs ?
- Ils squattent sous le pont de Garonne, je les vois chaque jour en rentrant chez moi.
- Eh bien allons-y mes amis, il n'y a pas une minute à perdre».
Et la délégation de commerciaux, directeur de l'établissement en tête, prit illico à pieds, la direction du pont de Garonne.

- «Comme il s'agit d'une idée de Mademoiselle Brigitte, c'est elle et elle seule qui mènera les négociations, précisa le Directeur».
- «Bonjour Madame, bonjour Monsieur, belle journée n'est-ce pas ?
- Bonjour M'dames, bonjour M'sieurs … euh … oui … c'est pourquoi ?
- Nous venons vous voir parce que Mademoiselle Brigitte ici présente a une proposition à vous faire !

???

- Madame, Monsieur, voila ce qui nous amène, seriez-vous d'accord pour jouer au Père et à la Mère Noël ces deux prochains jours ?

???

- Alors, qu'en pensez-vous ?
- Qu'est-ce que tu en dis toi, mon François ? Pour moi, c'est d'accord.
    - Et pour moi aussi pardieu c'est d'accord, c'est le genre de travail dont j'ai toujours rêvé ! Rendre le sourires aux enfants tristes en leur offrant toute la magie de Noël, mais oui bien sur que je suis partant ! Quand commençons nous ?
- Eh bien félicitations ma petite Brigitte, voila une négociation rondement menée !

- Quand commençons nous ? Mais tout de suite mes amis tout de suite, les enfants vous attendent et ils sont impatients !
Tu t'imagines ma Princesse, ton vieux François en Père Noël ? Ah çà oui, nous allons les gâter les chers petits ; et avec ce que nous gagnerons, nous allons pouvoir leur en offrir des poupées et des trains électriques !!!



lundi 24 octobre 2016


La Musique en trois tableaux

Tableau 1





Ses doigt lentement s'animent sur le manche de la guitare, il pince une corde et une note cristalline s'envole et monte vers le ciel, le silence qui suit en appelle une autre, beaucoup d'autres. Son visage est calme mais son regard est déjà ailleurs, dans un pays de soleil et de ciel bleu. Une seconde note s'égraine et semble exploser telle une bulle de savon. L'auditoire recueilli et impatient attend la suite. Un silence quasi religieux règne dans la salle. Puis tout à coup les accords s'enchaînent, le guitariste semble entrer en transe. C'est un déchaînement, ses doigts courent sur les frètes à une vitesse prodigieuse et nous emmènent aux confins sud de l'Espagne au pays des corridas, des processions, et du flamenco. La musique nous transporte vers ces terres arides, alternant pauses et accélérations soudaines.
De fringants cavaliers aux costumes ajustés sont là devant nos yeux. Ils font virevolter au son des castagnettes de fières andalouses au regard de braise ceintes de robes aux couleurs chatoyantes. La foule est subjuguée et des « olé » ponctuent les envolées et les arabesques des tissus soyeux, les talons martèlent le sol dans un ballet millimétré, les tambourins apportant du relief aux différentes phases, les éventails s'ouvrent et se ferment en cadence. Le public trépigne et applaudit à tout rompre les figures les plus représentatives de ce dialogue. Il se rapproche progressivement des acteurs et n'y tenant plus, pour mieux communier avec eux, se met lui aussi à danser. On ne peut être qu'emporté, on ne peut qu'être ensorcelé par la magie de ce spectacle haut en couleur qui défile sous nos yeux émerveillés.
Petit à petit les danseuses deviennent plus lascives, leur geste sont moins saccadés, plus sensuels puis insensiblement le guitariste nous extirpe de notre rêve éveillé pour nous ramener progressivement à la réalité. Mais quel extraordinaire voyage, quel merveilleux moment !!!




Tableau 2




A Salzbourg, en Autriche, dans le saint des saints de la musique classique où le public retient sa place trois ans à l'avance, les quatre vingts musiciens de l'orchestre symphonique attendent patiemment leur chef. Celui-ci apparaît enfin en redingote et chaussures vernies. Un silence absolu règne dans la grande salle richement décorée de centaines de bouquets de roses rouges qui ornent la scène et les balcons. Il salue le public puis accapare l'attention des musiciens. La pièce peut commencer, pianissimo d'abord avec les violons et les hautbois puis progressivement entrent en scène les bassons et les flûtes traversières. Les notes cristallines de la harpe venant à point nommé ponctuer l'ensemble. Et c'est soudain comme une vague de fond qui donne corps à la pièce avec les trompettes les cors et les cymbales. Le public ne peut s'empêcher de battre silencieusement la mesure emporté par les accords plaqués au piano et la ponctuation des cuivres. Mozart peut être fier de son œuvre qui n'a pas pris une ride en trois siècles. Elle est jouée telle qu'il l'avait conçue sans en changer le moindre soupir. Quel hommage rendu à ce compositeur d'exception qui fera encore vibrer les générations à venir !
Les belles aristocrates tourbillonnent aux bras de leur cavalier dans la grande salle de bal sous les yeux attendris du monarque, organisateur de la fête. L'auteur est là dans les coulisses, discret. Il savoure ce qu'il pense être son savoir faire sans imaginer un seul instant qu'il s'agit d'avantage de génie, d'un génie resté inégalé à ce jour ! La « valse favorite » prend fin pour laisser place à un menuet et à une gavotte, puis la « marche turque » propose quelque dépaysement avant l'entre-acte.
Les applaudissements du public debout viennent confirmer si nécessaire aux musiciens l'excellence de leur travail.
Un quart d'heure passe puis la deuxième partie s'ouvre sur un adagio, suivi de « l'Ave Verum Corpus », de la « flûte enchantée » et d'une « sérénade «  languissante pour enfin terminer la session par « Don Giovani » et mettre fin au rêve éveillé du public. La dernière note égrenée un tonnerre d'applaudissements retentit montrant à quel point des auditeurs ont apprécié ces œuvres mille fois écoutées et mille fois redécouvertes ! Il frappe dans ses mains, tape des pieds et en redemande.
Après quelques minutes de manifestation d'une telle ferveur, il est enfin récompensé par le retour du maestro et la reprise de son morceau favori qui achèvera ces deux heures d'un spectacle intense. Cette fois le chef d'orchestre quitte définitivement la scène croulant sous les bouquets de fleurs. Le public, à contre cœur, quitte lentement la salle en pensant déjà au prochain concert … qui n'aura lieu que dans trois ans !




Tableau 3





Au carrefour de deux tunnels du métro parisien, quelques musiciens et une chanteuse sont là.
Une guitare, un banjo, une clarinette, un saxophone, une batterie et une contre basse compose le petit l'orchestre de jazz. L'accoutrement des musiciens n'est pas très enviable, pantalons déchirés, blousons élimés, bonnets enfoncés jusqu'aux oreilles. Il ne semblent pas voir la foule qui, telle une meute de fourmis se croise en tous sens. Puis sur un signe imperceptible ils commencent à jouer un air endiablé des années quarante, çà tangue, çà swingue dès l'introduction. La chanteuse offre alors au maigre auditoire toute la tessiture de sa voix et entraîne les spectateurs de plus en plus nombreux maintenant, dans les quartiers de la Nouvelle Orléans, dans l'empire du jazz, là où la musique est partout, sur les trottoirs, dans les squares, dans les bars, dans les jardins publiques. Là où se retrouve une foule bigarrée de tous âges et de toutes origines pour se mettre au diapason des musiciens et danser à en perdre la raison jusqu'au petit matin.
Les tubes s'enchaînent Duke Ellington, Sydney Bechet, Mike Davis, Louis Amstrong … un festival ! Soudain la meute de fourmis subjuguée s'est figée, quelle importance d'arriver au bureau avec un quart d'heure de retard ? On bat la mesure, on se déhanche, spontanément des couples se forment et se lancent dans des rocks endiablés. La foule compacte côtoie dangereusement le ballaste, chacun veut sa part de rêve avant de retrouver la grisaille du dehors. Cette improvisation va au delà de toute espérance, les appareils photo crépitent, des vidéos sont tournées qui, dans quelques instants seront relayées sur moult sites et réseaux. Les sept musiciens parfaitement inconnus l'instant d'avant sortent de l'ombre, une audience internationale leur est offerte. Ne cachant pas leurs joie ils se donnent à fond, encouragés par des applaudissement nourris.
Et voila comment en une matinée notre chanteuse et ses amis sont passés d'un total anonymat à la notoriété, conscients de la fragilité de leur position, mais savourant néanmoins pleinement ce moment de grâce. Nul doute qu'ils auront été repérés par des personnes de métier qui leur proposeront rapidement des contrats à la hauteur de leur talent.
La musique parait-il, adoucit les mœurs mais elle peut aussi accomplir des miracles !

mercredi 12 octobre 2016



Nous sommes le monde !

(Clin d'œil à Michaël Jackson)

De la naissance à la mort les Hommes façonnent le monde à leur image puis d'autres Hommes voient le jour et prennent le relais. Chaîne humaine s'étalant sur des siècles et des millénaires créant une civilisation avec ses progrès, sa maturité, sa décadence et enfin son déclin. Il en est ainsi depuis la nuit des temps. Alors une autre civilisation s'installe pour écrire une nouvelle page d'Histoire qui se terminera une fois encore par le reniement des valeurs, par la perversion des mœurs, par l'incivisme, la délinquance, le laisser aller propice à tous les abus, la collusion, la trahison, le collaborationnisme.
Ainsi va la vie et rien n'y personne ne peut s'opposer à ce cheminement, des élites qui nous gouvernent au plus humble des citoyens. Chacun s'imagine qu'il a un destin à accomplir : maison, travail, famille, revenus importants, transmission du patrimoine à sa descendance …
Et si nous nous trompions tous, et si la vie sur Terre était régie par d'autres lois et notamment une loi universelle applicable au quotidien que l'on appellerait « Amour » ? Amour de sa compagne, Amour de ses enfants, Amour de son prochain, de son voisin, du voleur à la tire, des personnes sans abri... Amour sans discrimination de race ni d'origine. Amour, le maître mot, le mot d'ordre, le leitmotiv.
Au diable l'argent, la richesse de chacun étant alors proportionnelle à son aptitude à répandre l'Amour autour de lui.
Si nous pouvions entrer en communication avec les défunts je suis persuadé qu'ils nous diraient que c'est bien dans cette direction qu'il faut aller, ils nous suggéreraient de nous écarter des plaisirs futiles et de protéger notre entourage d'un cocon d'Amour, seule véritable valeur.
Mais l'Homme porte en lui sa part de ténèbres, sa part de cruauté, son égoïsme n'a d'égal que sa quête permanente de pouvoir, jamais satisfait toujours en recherche de nouveaux territoires à conquérir, de peuples à soumettre. Il croit diriger le monde alors que sa vie sur Terre est plus qu'éphémère, il souhaite marquer de son empreinte chaque mètre carré du sol qu'il foule, il veut imposer sa Vérité à des peuplades au savoir ancestral bien plus en accord avec la Nature qu'il ne l'est lui-même. Chacun de ses actes est pétri d'arrières pensées, chacune de ses actions est un pas de plus vers un pouvoir plus grand encore.
Les religions seraient abolies car génératrices de guerres. L'aura de chacun indiquerait sans erreur possible où il en est de son cheminement vers cette quête, ce qui constituerait la seule et unique hiérarchie possible. La vie communautaire serait privilégiée au profit des familles isolées et toutes les tâches quotidiennes seraient réalisées dans la joie et la bonne humeur en ayant en permanence en tête le bien être de l'autre. La Nature serait préservée, les animaux seraient respectés et aimés. Plus de manufactures, plus d'usines, plus de travail éreintant. Nous construirions d'humbles demeures pour nous abriter des intempéries et non pour épater son voisin, les Hommes seraient respectueux des Femmes et inversement et l'égalitarisme entre individus serait poussé à l'extrême. L'idée même de propriété serait abolie et les échanges seraient essentiellement basés sur le troc.
Certaines communautés ont bien tenté, notamment dans les années soixante dix, ce genre d'aventure … en vain … parce que l'environnement leur était hostile. Ils devaient survivre dans un monde décalé, un monde à des années lumières du leur, un monde qui ne partageait pas une seule de leurs idées, voilà pourquoi ces expériences ont échoué.
Imaginons un instant cette éventualité : certes la vie serait très différente de celle que nous connaissons aujourd'hui. Il n'y aurait plus de guerres pour enrichir les fabricants d'armes, il n'y aurait plus de téléphone portable qui a lui seul est d'une des plus grandes entraves à la liberté individuelle, il n'y aurait plus de télévision donc plus de dictature des médias, il n'y aurait plus d'automobiles donc, plus de besoins en carburant et la fin des cartels pétroliers, il n'y aurait plus de réseaux sociaux donc plus de désinformation et de campagnes de dénigrement. Les gens vivraient au jour le jour de produits sains récoltés dans leurs jardins ou prélevés dans la nature, certaines maladies, cancer, stress, dépressions, s'élimineraient d'elles mêmes. Les déplacements seraient limités à la distance pouvant être parcourue par son cheval. Des bateaux à voiles remplaceraient les géants des mer coûteux et polluants. Les grandes surfaces laisseraient la place à de modestes échoppes dans lesquelles nous trouverions les produits de première nécessité.
Chaque individu composant la communauté se verrait attribuer des tâches à accomplir en relation directe avec ses compétences. Les anciens enseigneraient aux plus jeunes les lois de la nature, le dialogue serait rétabli, les veillées seraient des moments privilégiés pour partager expérience et savoir. Nous nous chaufferions au feu de bois, nous éclairerions à la bougie, nous nous baignerions dans les rivières ou dans les lacs et notre impact sur l'environnement serait réduit à sa plus simple expression. Il existe encore de par le monde, de nos jours, des communautés qui vivent ainsi depuis la nuit des temps et qui s'en portent très bien.
Leur extinction intervient généralement lorsque des explorateurs zélés veulent leur imposer des coutumes qui ne sont pas les leurs et en les exposant à des maladies « exotiques ».
Utopie me direz-vous ? Pas tant que cela car cette vie saine et désintéressée pourrait tout simplement être celle qui s'imposerait d'elle même aux survivants d'un cataclysme naturel global ou à la suite de l'explosion d'une multitudes de bombes thermonucléaires.
Des volcans éteints se réveillent, les catastrophes naturelles se multiplient entraînant des milliers de victimes, nous sentons confusément que le monde est en train de changer. Parallèlement les conflits se multiplient, rien ne va plus dans ce monde déboussolé et la situation décrite plus haut peut être raisonnablement envisageable.
Ce retour à l'essentiel pourrait être hautement salutaire car même si nous ne nous en rendons pas compte, nous sommes prisonniers du « progrès » qui nous lie pieds et poings chaque jour un peu plus. Travailler jusqu'à l'épuisement pour produire d'avantage de richesses qui finalement ne profitent qu'à un tout petit nombre et créer en permanence de nouvelles technologies qui nous rendent totalement dépendants ne constitue pas en soi un progrès, bien au contraire. La société de consommation dans laquelle nous vivons n'est qu'une fuite en avant vers plus d'enfermement moins de liberté et d'avantage d'égoïsme ! Nous vivons repliés sur nous mêmes en imaginant que le bonheur est lié à l'acquisition d'un bel appartement ou d'une belle voiture et en ignorant souverainement le voisin de palier seul et malade … quelle absurdité !!! Est-ce là la raison pour laquelle nous sommes sur terre ???
Tout ceci ne vaut-il pas quelques minutes de réflexion ???



Ah passion quand tu nous tient !!!


La passion peut revêtir divers aspects, elle peut être amoureuse ou orientée vers des sujets aussi divers que l'aéronautique, la chirurgie, une cause humanitaire, un sport, la faune, la flore etc... C'est une maîtresse intransigeante qui cannibalise l'esprit.
C'est un feu dévorant qui occulte la plupart de nos facultés mentales. Elle balaie tout sur son passage pour une concentration exclusive, permanente, lancinante, obsédante sur le sujet qui nous préoccupe et qui nous en fait perdre appétit et sommeil !
Elle peut aussi bien nous procurer des éclairs de génie, nous transcender, nous grandir, ou au contraire nous miner, nous détruire et nous plonger dans une profonde apathie. Elle peut laminer l'adolescent et créer de graves blessures à l'adulte mais elle s'émousse progressivement avec l'âge.
Certaines passions explosives vécues dans leur jeunesse, sont vues parfois avec le recul par les seniors comme de simples futilités. L'alchimie mentale évolue avec le temps. L'importance que l'on attribue aux choses est fondamentalement différente à quinze ans et à soixante ans. Cela ne veut pas dire pour autant qu'à cet âge là nous ne pouvons plus être passionnés mais l'intensité même de la passion est modulée par les expériences diverses antérieures et atténuée par rapport à celle que l'on a pu ressentir par le passé.
La passion tout comme la foi peut nous faire « déplacer des montagnes », elle peut nous faire accomplir des actes hors du commun, elle nous fait apparaître, tant à nous même qu'à notre entourage, sous un autre jour, bouleversant jusqu'aux traits de notre visage. Elle escamote nos peurs, nous jouons à saute mouton avec les nuages. Nous chevauchons un fier destrier rapide comme l'éclair faisant fi de tous les obstacles, le monde nous appartient et rien ni personne ne peut nous arrêter. Tous nos sens sont en éveil, notre attention est focalisée sur le but que nous nous sommes fixé et tout le reste ne prend plus qu'une forme anecdotique. Jamais auparavant notre détermination n'avait atteint de tels sommets.
Les hautes falaises jugées infranchissables s'arrondissent en collines, les grands fleuves deviennent des rus, les espaces océaniques des lacs que l'on peut traverser à la nage !



Le retour parmi le « commun des mortels » par contre, peut être extrêmement douloureux, la descente sur terre peut prendre la forme d'un doux atterrissage ou d'une longue chute libre terminée par un écrasement
brutal à la hauteur de notre ressentiment ! Avoir côtoyé l'arc-en-ciel et se retrouver dans le caniveau est une épreuve que personne ne veut vivre et ne peut concevoir !... Puis petit à petit les souvenirs s'estompent, la vie reprend ses droits, la parenthèse se referme nous laissant d'indélébiles bleus à l'âme que le temps ne pourra jamais effacer totalement.
Quand nous estimons que tout ce qui était en notre pouvoir a été accompli nous pouvons considérer l'échec comme inéluctable et les plaies se referment plus facilement. Dans le cas contraire la passion avortée peut nous poursuivre toute notre vie, voir nous faire commettre l'irréparable !
Nous sommes presque tous un jour ou l'autre soumis à la passion, passion amoureuse, passion pour une cause, pour le but ultime de sa vie, c'est un bain de pétales de roses dans lequel on se coule avec délice qui nous réchauffe les os et le cœur, un état d'âme que je souhaite à chacun d'avoir connu au moins une fois dans sa vie. C'est usant, fatigant, exaltant mais au bout du chemin il n'y a jamais que deux alternatives possibles : l'apothéose … ou la dépression !!!


Aux alentours de minuit,

Adrien un jeune homme de vingt quatre ans erre en guenilles, pieds nus, dans un quartier mal famé. Une zone dédiée aux trafics en tous genres, armes, drogues, prostitution
où les petits délinquants côtoient la pègre et le grand banditisme.
Comment passer inaperçu quand chaque môme est un guetteur
quand des dizaines de paires d'yeux scannent les alentours ?
Les vapeurs d'alcool pas encore dissipées, il trébuche sur une bouteille de bière,
Le vacarme sort brutalement de son sommeil un chat endormi qui pousse un cri rauque
et bondit lui frôlant le visage. Le vent agite une porte métallique qui grince et la pluie se remet à tomber. Dans un rai de lumière il aperçoit des rats en quête de nourriture.
Passant devant une porte cochère il est happé par une vieille qui lui propose une passe ...
Trop bu, trop fatigué, une autre fois peut-être ?
La pluie redouble d'intensité, ses vêtements lacérés sont trempés, il est transi. Une chouette pousse un cri lugubre. Il sent autour de lui une présence indéfinissable, toute une fraternité d'animaux nocturnes à la recherche de sa pitance. Dans le lointain un chien insomniaque hurle à la mort imité par toute une meute de congénères. Dans un recoin sombre il devine une forme humaine tapie prête à bondir et croit même voir le reflet de la lame d'un surin. Son cerveau embué lui prescrit de changer de trottoir. Il trébuche une nouvelle fois sur la cérame et se rattrape in extremis à un arbre.
Dans un éclair de lucidité il se demande ce qu'il fait là et où il va. A quoi bon continuer ? Un pont sur le fleuve lui offrira un abri salutaire en attendant le jour ... et un esprit plus clair.
Mais c'est sans compter sur la présence de trois clodos qui ne l'entendent pas de cette oreille et qui tiennent avant tout à leur tranquillité. En deux temps trois mouvements il est pris en chasse, invectivé, menacé et manque de peu de tomber à l'eau en s'enfuyant, poursuivi par des quolibets et des insultes. Marcher, marcher, marcher encore ! Dans un affreux gargouillis il vide subitement sa panse jusqu'à ce que ses vomissures se transforment en jets liquides puants lui donnant l'impression cracher son estomac. Il s'affale de tout son long, à même le sol, trempé, vaincu et tremblant !
Mais qu'a-t-il bien pu se passer ? Mémoire effacée, le vide sidéral, par séquences il tente de se remémorer les heures précédentes, en vain. Dans son environnement immédiat il distingue un banc défoncé et dans un effort surhumain s'y hisse et tombe aussitôt dans les bras de Morphée.
Le somme lui a fait du bien et par bribes les souvenirs reviennent : la violente dispute avec sa femme des mots que l'on n'a pas voulu dire et qui néanmoins ont été prononcés, des mots vexatoires
qui lui ont rappelé si besoin était sa situation de demandeur d'emploi et son penchant pour les alcools forts et le jeu. Cette fois c'en est trop, il sort de ses gonds, il la bouscule alors qu'il n'avait jamais levé la main sur elle auparavant … ses mains serrent le cou frêle, elles serrent de plus en plus fort, les paroles venimeuses se transforment peu à peu en une sorte de râle, la résistance s'apaise, le corps n'est plus que poupée de chiffon puis, plus rien ! Sorti de son cauchemar il se demande ce qui lui a pris comment il en est arrivé là mais les faits sont les faits : il vient d'étrangler son épouse !!!
Affolé il hurle : « Babette, Babette » mais Babette n'est plus ! Il tente l'impossible, lui insuffle de l'air dans les poumons, lui pratique des massages cardiaques mais il doit finalement se rendre à l'évidence. Il pleure, il tourne en rond, il hurle son désespoir puis son cerveau se met en pause, il sort de chez lui pieds nus, les vêtements lacérés lors de la dispute, un sac à dos contenant tous les alcools encore disponibles dans la maison. Dernière image de cette soirée de cauchemar ! Si il ne peut se rappeler la suite au moins peut-il l'imaginer, les bouteilles sont vides … et comment est-il arrivé là ? Mystère.
Il sent graduellement monter en lui la colère qui laisse rapidement place au désespoir. Il pleure comme un enfant. Retourner chez lui, tout avouer à la police ou enterrer le corps dans les bois et s'enfuir le plus loin possible. En Australie, pourquoi pas, ce pays l'a toujours fasciné ?
Une mauvaise toux le surprend et le plie en deux lui fournissant une nouvelle envie de vomir. Les premières lueurs de l'aube lui font découvrit un petit matin blafard, la pluie a cessé de tomber, le quartier lui paraît encore plus lugubre qu'en pleine nuit. Plus de bruits suspects mais un silence oppressant, le brouillard par vagues successives oblitère tout, il se fait l'effet d'une marionnette désarticulée, il pleure depuis des heures mais ses larme se sont taries.
Dans un moment de lucidité il fait le bilan de sa vie : enfance et adolescence sans problème, diplôme de commerce en poche il crée sa propre entreprise et dans la foulée épouse Babette qu'il connaît depuis toujours. La première année de mariage se passe comme dans un rêve mais l'année suivante la liste de ses clients s'éclaircit l'obligeant finalement à déposer le bilan. S'en suivent des jours et des semaines à faire la tournée des bars, à faire quelques tarots pour des mises minimes puis le poker prend le relais avec des enjeux nettement plus importants, propices pourquoi pas, en cas de gains, à un nouveau départ. Les mois passent les dernières économies se sont évaporées. Babette de loin en loin tente de briser ce cercle infernal, les disputes succèdent aux disputes qui se font de plus en plus violentes … jusqu'à la dernière … hier soir !!!
Comment pourra-t-il continuer à vivre avec un aussi lourd fardeau sur les épaules, la cellule d'une maison d'arrêt lui apportera-t-elle tôt ou tard l'apaisement ou viendra-t-il d'un visiteur de prison qui lui rendra progressivement espoir ? Non décidément ce n'est pas là que réside la solution et en prison le manque d'alcool le tuera aussi sûrement que si il se tirait une balle dans la tête !
Il en est là de ses réflexions lorsqu'il voit émerger du brouillard cinq formes fantasmagoriques tout droit sorties d'un roman d'épouvante, gueules cassées, vêtues de vielles frusques qui l'encerclent progressivement. Les commentaires vont bon train à propos de cet intrus dans leur quartier … et les intrus, on n'aime pas çà ! Mais peut-être, malgré ses apparences, aurait-il quelques biens sur lui ? Pendant que l'une de ces créatures cauchemardesques l'invective, deux autres, par derrière l'immobilisent. Après une fouille en règle sans avoir décelé quoi que ce soit d'intéressant, la colère s'empare du groupe et les coups commencent à pleuvoir. Adrien se protège comme il peut et lance même au hasard quelques coups de poing mais très vite il comprend qu'il ne fera pas le poids vis à vis de ces brutes. Il s'imagine un instant dans la peau de sa Babette la veille et n'offre plus la moindre résistance espérant bénéficier d'un traitement similaire. Il est maintenant à terre, du sang coule de sa bouche et les coups de pieds redoublent de violence, aucune partie de son corps n'est épargné. Il n'est bientôt plus qu'un tas de chair et d'os. Puis l'un de ses agresseurs le tire jusqu'au trottoir s'empare de sa tête et la cogne de toutes ses forces contre l'arête de pierre … et la vie d'Adrien s'envole à tout jamais de ce cloaque. Sa dernière pensée aura été pour son épouse à laquelle il a offert en quelque sorte sa vie afin d'expier sa faute.
Si vos passez par le cimetière de son village où il est enterré aux côtés de sa femme vous pourrez y voir un caveau abondamment fleuri et y lire cet épitaphe : « A Babette et Adrien un couple aimant a nouveau réuni après tant d'épreuves, pour l'éternité « 













Il était une fois ...

Il était une fois un petit faon appelé Tex qui vivait avec sa maman dans une forêt enchantée.
Les arbres gigantesques apportaient leur ombre rafraîchissante en été et en hiver ils permettaient à tous les animaux de s'abriter de la neige et du froid. Les buissons et l'herbe en sous bois constituaient une source inépuisable de nourriture dont Tex et sa maman se repaissaient en toutes saisons. Il y avait aussi des fruits, des baies et des mures délicieuses qui avaient la préférence de Tex.
Repu de tant d'abondance, il s'allongeait et faisait de petites siestes, l'esprit vaguement aux aguets. Au réveil il avait encore parfois quelques difficultés à se dresser sur ses quatre pattes mais rapidement son entrain naturel le poussait à gambader et à faire des sauts prodigieux qui faisaient l'admiration de Daisy, sa maman.
Les jours s'écoulaient paisibles et Tex grandissait, au fil des jours il avait tendance à s'éloigner de plus en plus pour découvrir seul le vaste monde. Il savait maintenant reconnaître la plupart des autres animaux qui peuplaient cette immense forêt. Il avait eu plusieurs fois l'occasion de rencontrer des hérissons qui lui piquaient la truffe quand il voulait jouer avec, des hardes de biches et de cerfs aux bois impressionnants qui le regardaient d'un œil amusé faire ses galipettes, des lièvres aux longues oreilles avec lesquels ils faisait des courses folles, des renards aussi dont sa maman lui avait appris à se méfier, des libellules fragiles au vol zigzaguant. Des abeilles avec lesquelles le dialogue était difficile car elles ne cessaient de butiner d'une fleur à l'autre, trop préoccupées par leur travail pour répondre à ses questions, des escargots évoluant au pas de sénateur, des grenouilles bondissantes avec lesquelles il s'amusait follement des heures durant. Il y avait aussi bien sur des oiseaux qu'il aurait voulu pouvoir imiter tant leur vol le fascinait.
Après ces explorations de plus en plus lointaines et ces jeux innocents, Tex retrouvait rapidement Daisy qui continuait inlassablement à lui prodiguer des conseils avisés qu'il écoutait d'une oreille distraite, impatient qu'il était de retrouver ses amis. Et c'est ainsi qu'un jour, estimant qu'il était assez grand pour comprendre, sa maman lui fit un long exposé sur l'Homme. Elle le lui décrivit sommairement en lui précisant que bientôt elle l'emmènerait en un endroit d'où il pourrait le découvrir tout en restant bien abrités de ses regards derrière les feuillages du sous bois. Elle le lui présenta comme un ennemi impitoyable devant lequel il ne fallait jamais se dévoiler. C'est un prédateur habile capable de nous abattre à distance avec un long bâton qui crache du feu lui dit-elle. Il ne faudra jamais flâner dans les prairies à découvert ou t'approcher de son habitation. Quand il fait très chaud il est plus calme mais dès que les feuilles commencent à jaunir il parcourt des distances considérables en plaines, vallées et coteaux et pas un de nos amis n'est épargné. Quand il actionne son bâton de feu on entend un bruit aussi fort que le tonnerre et dans la plupart des cas un de nos compagnons gît sans vie, plus loin sur le sol.
A quelques jours de là, au petit matin, Daisy et Tex se mirent en marche. Ils cheminèrent plusieurs heures en sous bois et Tex après l'émerveillement de la découverte de lieux extraordinaires et inconnus, commençait à trouver le temps long et à avoir mal aux pattes. Puis soudain, ils se retrouvèrent à l'orée de la forêt ébloui par le soleil. Tex n'aurait jamais imaginé auparavant qu'une telle lueur existe, il ne cessait de cligner des yeux et des larmes se mirent à couler qui n'étaient pas dues à l'éblouissement mais à l'émerveillement de ce qu'il pouvait admirer de leur poste d'observation. Tu vois mon enfant toutes ces habitations accolées les unes aux autres là-bas, eh bien c'est là que vivent les Hommes. Tu ne t'en approcheras sous aucun prétexte. Depuis le sommet de la colline ils dominaient de vastes étendues cultivées aux couleurs chatoyantes, au fond des vallons ombragés couraient des ruisseaux et les cultures qui s'étendaient à perte de vue étaient bien tentantes.
Les mises en garde de Daisy achevées, ils longèrent l'orée de la forêt jusqu'à une habitation isolée à quelques encablures et là et pour la première fois Tex découvrit l'Homme. Il se tenait sur ses pattes arrières ce qui l'amusa et l'intrigua beaucoup. Il poussait quelque chose devant lui tiré par un gros animal qui lui était inconnu. Il se perdait en conjectures quand sa maman lui précisa qu'il s'agissait d'un doux animal totalement inoffensif malgré sa taille. L'Homme lui dit-elle a fait de lui un esclave et utilise sa force pour gratter la terre. Plus loin ils découvrirent d'autres humains affairés dans les champs à des tâches diverses et enfin ils tombèrent sur un troupeau des grands animaux cornus entrain de paître, Daisy expliqua que ces animaux là, eux aussi malgré leur taille, étaient totalement inoffensifs, qu'elle en avait côtoyé de très près par le passé et qu'ils étaient tout à fait amicaux.
Puis ils s'enfoncèrent de nouveau dans la forêt broutant ici une herbe grasse ou là se délectant d'une baie délicieuse. Le jour déclinait lorsqu'ils rejoignirent leur abri et sombrèrent tous deux rapidement, la fatigue aidant, dans un profond sommeil. Le lendemain Tex harcela Daisy de questions sur ce qu'ils avaient vu la veille et sa maman s'efforça calmement de lui fournir les meilleurs explications possibles en espérant que Tex en ferait bon usage et qu'elles lui permettraient de mieux affronter le monde et ses dangers.
C'était sans tenir compte de la désinvolture de son jeune faon !!!
Les jours suivant Tex poursuivit de plus en plus loin ses explorations solitaires et un beau jour à l'époque où les feuilles jaunissent, il s'aventura malgré les mises en garde de sa maman, hors de la forêt. Dans un verger il se goinfra de fruits doux et juteux à en attraper une indigestion et au moment où le soleil était au zénith il rejoignit sans méfiance l'abri du sous bois. C'est alors qu'il entendit un coup de tonnerre très bref et qu'immédiatement il ressentit une douleur fulgurante à sa patte arrière gauche. Il voulut s'enfuir au plus vite vers l'orée d'un bois mais la douleur était si vive qu' il ne parvenait pas à courir normalement et là lui revint en mémoire l'une des mises en garde de Daisy : « ne jamais évoluer à découvert » mais trop tard, le mal était fait ! Il s'efforça au prix d'incroyables efforts d'accélérer la cadence pour quitter ce glacis où il se sentait tout à coup tellement vulnérable et après quelques secondes de total désarroi, regagna enfin la forêt. La frustration d'avoir désobéi aussi ouvertement à sa mère était au moins aussi forte que la douleur physique. Il ralentit le pas et c'est en boitillant et la tête basse qu'il retrouva Daisy à la nuit tombée.
En bonne mère, elle ne lui fit aucun reproche et s'affaira aussitôt à lui lécher le flanc. Cela eut un effet presque miraculeux et la douleur s'apaisa juste avant qu'il ne tombe dans les bras de Morphée.
Le lendemain tout penaud il vint se blottir contre sa mère qui n'eut de cesse de le réconforter physiquement et mentalement sans jamais émettre la moindre allusion à sa désobéissance flagrante de la veille. Elle était si fière de son adolescent et de le retrouver ainsi, en parfaite santé malgré cette chaude alerte ! Elle savait maintenant que la leçon principale avait été assimilée pour toujours et les jours s'écoulèrent ainsi paisibles et sans autre alerte significative, à brouter à gambader à se régaler de délicieuses mures juteuses et sucrées et à s'amuser avec les amis de la forêt.

samedi 23 juillet 2016



La Nomade


Cette femme là-bas au port altier
A la source s'en va chercher
L'eau pour boire, l'eau pour laver,
Pour préparer le déjeuner.

Chaque jour la corvée se répète
Parfois le mari rouspète
Quand à l'heure des ablutions
Il n'y a plus d'eau à la maison.

Ses enfants l'aident bien sur
Mais à leur âge c'est dur.
Charrier trente litres d'eau
Est pour eux un drôle de boulot !

Alors il y a l'âne, bête famélique,
Il y a aussi la bourrique
Qui chemine l'échine courbée
Transportant bois, galets, denrées,

Herbe, tentes et tapis
Quand le pâturage est tari.
Aller ailleurs, plus loin encore
Et à nouveau planter le décor,

Dresser un abri, traire les brebis.
Cette fois heureusement il y a un puits !
Pas le temps de rêvasser
Il faut à nouveau tout ranger.

Corvée d 'eau, encore et encore.
Pas de temps pour soi, pour s'occuper de son corps.
Cette vie là est tout sauf une sinécure
Ce qui n'empêche pas la nomade d'avoir fière allure.


vendredi 22 juillet 2016



Hommage posthume à un être cher,


Oui je sais on a déjà beaucoup écrit sur le sujet

Mais je ne peux à mon tour m'empêcher

De vous délivrer sans arrière pensée

Un point de vue à la fois simple et condensé


Sur l'objet de tous les fantasmes de toutes les spéculations,

Sur ce furet imberbe, souple ou dur comme l’airain,

Sur cet aventurier toujours avide de nouveaux horizons,

Sur ce chevalier arpentant inlassablement les chemins.


Chemins de traverses souvent, pour monter à l'assaut

D'une gente damoiselle dans la paille, dans le foin,

D'une vendangeuse, d'une lavandière revenant du ruisseau,

Trousser une rousse manifestant quelque besoin,


Une blonde, une brune, une maigrichonne ou une replète,

Butiner, tester, comparer, juste pour se faire une idée.

Au garde à vous à la simple évocation d'une joliette.

Tu t'émancipes sans retenue à la plage, en ville, au ciné.


De l'état de limace tu embellis pour devenir massue.

A la moindre pensée coquine c'est aussitôt la fête,

Un film érotique et te voila sans plus aucune retenue

Jappant au ciel, émoustillé, tu es décidément un vrai casse tête.


J'aimerais parfois que tu me demande mon avis,

Que l'on en parle que l'on prenne le temps d'en discuter

Mais ton cerveau plus vif que le mien prend très vite parti,

Tu me court circuites me laissant souvent décontenancé.


Pas un seul slow sans que je ne ressente tes désirs d'expansion.

Toujours prompt à te glisser dans tous les recoins.

Tu me fait honte parfois par la rapidité de tes décisions

Prises sans concertation, unilatéralement, sans témoin.


Sous la douche tu me nargues de ton œil moqueur,

Tu me remémores certains souvenirs cocasses

Desquels tu es sorti forcément vainqueur.

Toujours allant, toujours volontaire, toujours pugnace.


Néanmoins, avec le temps, tu es sujet à moins d'emballement

A plus de retenue, il nous faut parfois inverser les rôles,

T'encourager, car tu ne manifestes plus beaucoup d'empressement.

Tes entêtements trop souvent me désolent.


L'abstinence dont tu es seul responsable me pèse,

Tes infidélités trop fréquentes relèvent de la trahison.

Aurais-tu, si tôt, refermé la parenthèse

Serait-ce pour toi le début de la morte saison ?


Le fier chevalier a brisé sa lance et a mis pieds à terre.

De petites pilules bleues il devra désormais s'abreuver

Pour accomplir sa tâche, à sa cadence, pépère,

Chaque mois, chaque semestre … et bientôt chaque année !



jeudi 9 juin 2016



Mon meilleur ennemi,

Mon meilleur ennemi n'a de cesse de me contredire.
Il est tout ce que je hais, tout ce que je déteste.
Je me surprend même parfois à le maudire.
Il s'agit d' un drôle d'énergumène, sans conteste.

Nos centres d'intérêt sont diamétralement opposés.
Je lui parle musique, il me répond football.
Je lui récite des poèmes, il n'est manifestement pas concerné.
Je lui parle philosophie il enchaîne par des fariboles.

J'aime la mer, la natation, la voile, la plongée.
Il préfère la montagne, le ski dans la poudreuse.
Lui faire changer d'avis, inutile d'y songer
Ou il s'enferme alors dans une attitude boudeuse.

Mes amours sont pondérées et exclusives.
Les siennes sont exubérantes et plutôt débridées.
Il en fait collection de façon excessive
Pour lui la femme n' est qu'un instrument de frivolité.

Il est hâbleur, batailleur, et souvent arrogant,
C'est plus que je n'en puis supporter.
Je l'apprécierais plus coopératif, moins condescendant,
Plus élégant dans sa façon de se comporter.

Il m'exaspère tout autant qu'il me fascine,
Je l'exècre alors que secrètement j'aimerais lui ressembler.
Se mettre dans sa peau, vivre sa vie, non j'hallucine,
Rien de semblable ne pourra jamais m'arriver !


Mais alors pourquoi lui coller ainsi aux basques,
Pourquoi ne pas tirer définitivement un trait ?
Parce qu'il est simplement impossible d'échapper à ses frasques
Puisqu'il fait partie intégrante de ma propre personnalité !







dimanche 22 mai 2016



Technologie et liberté,


Ainsi va la vie, toujours plus de technologie et de moins en moins de libertés.
Les décideurs nous présentent régulièrement des avancées fondamentales 
Où je ne vois que perte progressive de notre libre arbitre de nos facultés.
On nous impose insidieusement un « prêt à penser », un couteau suisse sociétal.

La télévision, invention géniale permettant à tout un chacun de s'évader du quotidien
A conduit à une somnolence intellectuelle profonde et généralisée,
Un moyen ingénieux permettant de détourner l'attention du citoyen
Et d'éluder les vrais problèmes que rencontrent nos sociétés, dites civilisées.

Les allusions subliminales jalonnant les téléfilms sont autant de viols intellectuels,
Les journaux télévisés nous servent une soupe tiède, un pâle reflet de l'actualité.
Les censures imposées ou choisies par les chaînes, ces machines télévisuelles
Nous cantonnent dans un univers clos, entièrement ceinturé de fils barbelés.

Puis vint l'ordinateur, facilitant à l'extrême l'élargissement des connaissances,
Exempté théoriquement de censure mais permettant un fichage individuel élaboré,
Une surveillance de tous les instants, accordant aux dirigeants une toute puissance
Difficilement imaginable dans un proche passé, un pouvoir jamais égalé.

Passons rapidement sur la tablette et intéressons-nous aux portables.
Certes ils ont changé notre vie au détriment d'une perte sensible de nos libertés.
Leur géolocalisation en font des mouchards d'une efficacité redoutable.
Les adulateurs, malgré tous leurs avantages, en font chaque jour les frais.

Les grandes marques élaborent de nouveaux modèles chaque année
Que les fans s'empressent d'acquérir, se privant parfois de l'essentiel.
Les réseaux sociaux se chargeant de colporter les atteintes à la vie privée,
Les indiscrétions et les incongruités, devenues la norme dans ce monde virtuel.

Les caméras se sont partout invitées relatant nos moindres faits et gestes.
Les radars, machines intransigeantes, nous transforment en délinquants notoires
Pour des excès de vitesse dans bien des cas extrêmement modestes, 
N'empêchant en aucune façon toutes autres infractions rédhibitoires.

La technologie a du bon et rien ne peut ni ne doit arrêter le progrès.
Tout est dans l'usage que nous en faisons, dans les hautes sphères comme au bas de l'échelle.
A consommer avec précaution, avec modération, sereinement, sans excès.
A chacun de se forger sa propre opinion en évitant de tomber dans l'irrationnel.




dimanche 8 mai 2016



La piscine,

La piscine est un lieu de convivialité.
On s'y rafraîchi les jours de canicule,
On s'y exerce à la natation, on y barbote.
C'est un endroit ludique, un espace de liberté,

Un point de rendez-vous obligé entre amis.
Le port du bikini ou du boxer dévoile les corps,
Suggérant seulement ce qui prétend être caché,
Révélant de belles silhouettes musclées et affermies.

Les obèses rentrent leur ventre et sortent les épaules,
Les personnes voûtées se redressent,
On affine son image, on s' efforce de faire illusion,
On esquisse un pas de danse, on caracole.

Ici les convenances disparaissent
Pour laisser place à la décontraction, au bien-être.
On troque le tailleur ou le costume trois pièces
Pour donner libre cours au farniente, à la paresse.

On y lit, on y papote en dégustant des cocktails
On y somnole, on s'enduit mutuellement de crème, on y bronze.
On y lorgne les jolies filles et les jeunes Apollons
Dans un contexte non conventionnel.

Le soleil sur l'eau aveugle bien par moments
Mais la chaleur de ses rayons sur la peau
Constitue une véritable une cure de jouvence
Propice aux plus voluptueux des alanguissements.

Se détendre et remiser au vestiaire ses soucis,
Profiter de ces instants privilégiés
Sans aucune gêne sans aucune retenue,
Si peu nombreux finalement, tout au long de nos vies !