lundi 1 juin 2015


La Parisienne ,

Sur le quai de la gare une jeune femme attend son train.
Pour tout bagage une valise, seul vestige de sa vie dans la capitale.
Des idées nostalgiques la submergent, impossible de surmonter son chagrin.
Elle laisse derrière elle un peu d'elle même, un peu de son énergie vitale.  

Elle déroule le film des jours heureux, les escapades dominicales,
Les fou-rires, les sorties en boîte, l 'atmosphère stimulante
Dans laquelle elle s'est laissée bercer, cet écrin convivial
Dans lequel elle a baigné pendant toutes ces années nonchalantes.

Pourquoi partir, pourquoi avoir pris une telle décision
Il faut maintenant affronter l'avenir, reconstruire un tissu social,
Prouver son professionnalisme, faire peut-être des concessions,
Réapprendre à vivre, assumer ce choix à la fois osé et crucial.

Loin de l'effervescence qui lui semblait être sa raison de vivre,
Loin de son port d'attache, une larme furtive coule sur sa joue
Qu'elle s'empresse d'essuyer, elle attend que le coup de sifflet la délivre
Qu'il coupe le cordon qui l'enserre, au premier tour de roue.

Dans son wagon un jeune homme s'empare galamment de sa valise
Et l'installe dans le rack, assis côte à côte ils demeurent silencieux.
Plongés dans leurs pensées, chacun touche du doigt et réalise
Qu'une nouvelle vie commence, qu'il faudra se montrer audacieux.

L'audace n'est justement pas la caractéristique principale d'Eric
Mais d'emblée il est attiré par la grâce et l'élégance de cette jeune beauté.
Pour l'heure il semble absorbé par ses lectures ésotériques.
Dehors la nuit d'hiver est d'encre, Aurélie tire le volet.

Il ferme son livre et demande si il peut éteindre la veilleuse.
La somnolence les guette et rapidement ils s'endorment.
La tête d'Eric dodeline puis se cale contre une épaule moelleuse. 
Dans un rêve Aurélie lui saisit la main et leurs doigts se referment.

Au premier arrêt ils se réveillent et sans ouvrir les yeux se retrouvent enlacés
Comme deux enfants séparés depuis longtemps, heureux de se retrouver.
Eric enfouit sa tête entre les seins de la jeune femme et hume son parfum poivré,
Ses mains tout à coup autonomes, s'aventurent par monts et vallées.

Contre toute attente Aurélie accentue les caresses qui lui sont prodiguées,
Guidant ces mains aventureuses vers des territoires encore plus secrets.
Ces échanges appuyés font monter la température de plusieurs degrés
Jusqu'à ce que dans un soupir le fruit soit finalement consommé.

Est-ce un signe du ciel ? La grisaille fait soudain place à la lumière.
La tristesse, la nostalgie envolées, les larmes asséchées.
Un autre avenir se dessine, cette improbable rencontre ferroviaire
Ne peut-être le fruit du hasard, Aurélie reconnaît incontestablement en Eric, celui que depuis si longtemps elle attendait !